Lorsqu’un immeuble (par exemple, un terrain) est transféré d’une société à une autre sans qu’il y ait de modification de la propriété effective ultime (par exemple, entre des « personnes morales étroitement liées »), les droits sur les mutations immobilières du Québec ne s’appliquent pas. Cette exonération va maintenant s’étendre aux transferts d’immeubles appartenant à des sociétés de personnes, selon les modifications proposées à la Loi concernant les droits sur les mutations immobilières (RLRQ c D-15.1) annoncées le 20 décembre 2017 dans le Bulletin d’information 2017-14.
Les coentreprises immobilières sont couramment structurées comme des sociétés de personnes, et les fiducies de placement immobilier (REIT) sont tenues d’utiliser des sociétés de personnes. Avant ces propositions législatives, la réorganisation d’une société de personnes donnait souvent lieu à un passif au titre des droits sur les mutations immobilières, que l’on acceptait, malheureusement, comme coût d’affaires. Les exonérations visant les sociétés de personnes sont accordées dans d’autres provinces et pays depuis un certain temps déjà, de sorte que les modifications apportées au Québec peuvent être considérées comme une harmonisation des règles concernant les droits sur les mutations immobilières avec celles d’autres juridictions.
Avant les modifications proposées, il était parfois possible d’éviter le passif associé aux droits sur les mutations immobilières lors de transferts mettant en cause des sociétés de personnes, mais les jugements en matière civile étaient contradictoires, et une grande incertitude demeurait (voir par exemple, Allard ltée, 1996 CanLII 5712; Polyclinique médicale Fabreville, SEC c. Laval (Ville de), 2006 QCCS 3251; Ferme CGR enr., SENC (Syndic de), 2010 QCCA 719; et 9197-6837 Québec inc. c. Terrebonne (Ville de), 2014 QCCQ 685).
Les modifications proposées vont permettre une exonération du paiement des droits dans les circonstances suivantes (pour les transferts d’immeubles effectués après le 20 décembre 2017) :
- Le cédant (une personne physique) transfère un immeuble à un cessionnaire (une société de personnes) et, immédiatement après le transfert, la part du cédant dans les revenus ou dans les pertes de la société de personnes est d’au moins 90 pour cent.
- Le cédant (une société de personnes) transfère un immeuble à un cessionnaire (une personne physique) et, immédiatement avant le transfert, la part du cessionnaire dans les revenus ou dans les pertes de la société de personnes est d’au moins 90 pour cent. Si le cédant (une société de personnes) a été constitué moins de 24 mois avant le transfert de l’immeuble, l’exonération du paiement des droits sur les mutations immobilières sera accordée au moment du transfert si la condition d’exonération soit remplie pendant toute la période entre la date à laquelle la société de personnes est constituée et la date du transfert.
- Le cédant et le cessionnaire (deux sociétés de personnes) sont détenus directement ou indirectement par une personne ou une société de personnes dont la part dans les revenus ou dans les pertes de la société de personnes est d’au moins 90 pour cent. La même règle s’applique si l’une des parties est une société et l’autre une société de personnes.
Dans les trois circonstances décrites ci-dessus, la condition relative à la part de 90 pour cent des revenus ou des pertes doit être respectée pendant la période de 24 mois qui suit la date du transfert. Le mécanisme de divulgation, introduit dans le budget du Québec de 2016-2017 pour contrecarrer des stratégies courantes de planification fiscale, continue de s’appliquer aux sociétés de personnes, avec les adaptations nécessaires. Notamment, si la condition d’exonération relative au pourcentage de revenus ou de pertes cesse d’être respectée pendant la période de 24 mois qui suit la date du transfert, le cessionnaire d’un immeuble sera tenu de divulguer ce fait. (Voir « La nouvelle loi québécoise sur les droits de mutation immobilière », Canadian Tax Focus, août 2016, et la conférence de Raphael Barchichat intitulée « Droits sur les mutations immobilières », offerte par la Fondation canadienne de fiscalité, le 12 juillet 2016.)
*Texte initialement publié sur le site de la Fondation canadienne de fiscalité et disponible en cliquant ici.
Canadian Tax Focus
Volume 8, Numéro 1, Février 2018
©2018, Fondation canadienne de fiscalité
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